Cas fictif

Quoi de mieux qu'un cas fictif pour mieux comprendre Korsakoff ?

M. L, a 60 ans, il est veuf et a une fille et un fils âgés respectivement de 33 et 36 ans et est grand-père de deux petits garçons de 5 et 8 ans.

La relation avec sa famille s’est détériorée avec les années et reste aujourd’hui compliquée. Ses enfants ont le sentiment d’être impuissants face à sa maladie et semblent résignés à ce qu’il n’y ait aucune évolution.

M. L a fait un séjour en SSR pour une fracture du col du fémur suite à une chute. En effet, il présente des troubles de la marche, que l’on associe au fait qu’il est atteint du syndrome de Korsakoff. Du point de vue des symptômes, il présente également des troubles des mémoires épisodique, antérograde et rétrograde, une anosognosie, une désorientation spatio-temporelle, de fausses reconnaissances, et des confabulations.

A ce jour, la rééducation de M. L est terminée. Il a séjourné 5 mois dans le service de SSR près de chez lui et semble avoir récupéré le maximum de sa mobilité (il arrive à se déplacer sur de courtes distances sans aide technique, et nécessite une canne simple pour réaliser des trajets plus longs). La question de la suite du projet de soins de M. L s’est alors posée. L’équipe soignante pluridisciplinaire a pensé à une orientation institutionnelle, étant donné que les enfants refusent catégoriquement d’accueillir leur père chez eux, et qu’il ne peut pas vivre seul. Une orientation vers un EHPAD est proposée à M. L.

Quelle va être l'intervention ergothérapique ?

Il est important de relever le fait que M. L semble encore jeune pour intégrer un EHPAD mais également qu’il se trouve sur liste d’attente pour le moment. Malgré tout, l’EHPAD semble plus adapté qu’une MAS ou un FAM car ces deux institutions accueillent un public d’adultes handicapés gravement dépendants qui ont besoin de l’assistance d’une tierce personne pour les activités de la vie quotidienne et âgés, généralement, de moins de 60 ans. Cependant, les EHPAD s’adressent à des personnes âgées de plus de 60 ans qui ont besoin d’aide et de soins au quotidien. De plus, ils sont à même d’accueillir des personnes atteintes de la démence d’Alzheimer. Or, le syndrome de Korsakoff y est souvent apparenté notamment à cause des troubles de la mémoire existants. Il semble donc approprié de l’orienter vers ce type de structure.

Cela signifie qu’en attendant il va rester dans le SSR qui le prend en charge actuellement, bien qu’il ne présente plus de potentiel de récupération important (aussi bien sur le plan physique, que sur le plan cognitif). M. L présentant le syndrome de Korsakoff, un SSR Addictologique (ou au moins l’intervention conjointe d’une ELSA) aurait permis une intervention plus adaptée notamment en ce qui concerne la sensibilisation du patient et des soignants aux difficultés qu’il va rencontrer dans son environnement. Mais en attendant son transfert vers une institution de vie, un accompagnement vers une réadaptation et une réinsertion peut être amorcé.

Pour cela, il faut établir des objectifs en adéquation avec le projet de vie de M. L, mais également avec ses capacités.

Objectifs Moyens mis en place
Organiser sa journée (avec les soignants ou une tierce personne en amont mais utilisation seul par la suite)
  • Aides à l’organisation spatiale et temporelle : agenda, calendrier pouvant l’aider à se repérer dans le temps, mais également à noter son emploi du temps, ce qui lui permettrait de l’avoir affiché dans sa chambre à portée de vue, mais également de l’avoir sur lui.
  • Utilisation d’une montre, pour se repérer dans le temps au cours de la journée (au départ, nécessité de sollicitation des soignants pour la regarder).
  • Améliorer ses interactions (en lien avec la confabulation et les fausses reconnaissances)
  • Carnet mémoire dans lequel il peut catégoriser les informations, et par exemple, noter les difficultés qu’il rencontre, les noms et liens des différentes personnes de son entourage, le numéro et la localisation de sa chambre, les événements importants etc
  • Ce carnet mémoire peut s’accompagner d’un affichage dans sa chambre (style trombinoscope) récapitulant toute les personnes qui peuvent venir lui rendre visite (y compris le personnel soignant)
  • Etre capable de se déplacer seul dans un environnement restreint ou son lieu de vie
  • Aides au repérage à l’aide de fléchage dans l’institution, photo sur sa porte...
  • Organiser des mises en situation de déplacement et repérage au sein de la structure
  • Trouver et participer à des activités signifiantes pour lui (hors alcool - nouvelles stratégies) Entretiens avec M.L
    Améliorer sa conscience de soi (en lien avec l’anosognosie) Mise en situation dans les activités de la vie quotidienne dans lesquelles il rencontre des difficultés mais également celles qu’il souhaiterait réaliser avec un maximum d’autonomie et d’indépendance (ex: gérer ses rendez-vous, participer aux ateliers cuisines). Les loisirs pourront aussi faire l’objet de mises en situation (ex : jouer à un jeu de carte simple). Ces mises en situation auront pour but non seulement d’adapter au mieux les activités ou l’environnement de M. L mais seront également un support sur lequel l’équipe soignante pourra s’appuyer pour susciter un éveil de conscience.
    Favoriser ses relations avec sa famille Entretien avec l’entourage (enfants) afin de les sensibiliser à la maladie de leur père, et de leur permettre de comprendre certaines réactions/comportements

    La majorité des moyens ci-dessus (dont le carnet mémoire) requièrent un apprentissage de la part de M. L.
    Cependant lorsque l’équipe soignante met en place les aides et stratégies dites externes, elle tient compte de la manière dont cet apprentissage va se faire.
    Pour cela, elle a besoin de connaître le niveau de conscience de soi du patient ainsi que ses ressources attentionnelles.

    M. L est anosognosique, ce qui implique que l’on peut tenter, lorsqu’il sera face à une difficulté, d’éveiller sa conscience dite émergente.
    L’équipe ne va pas chercher à lui faire anticiper les difficultés qu’il pourrait rencontrer. De la même manière, elle va favoriser l’apprentissage sans erreur, la routine fonctionnelle et l’entraînement dans un environnement délimité et spécifique.
    Cet apprentissage va prendre du temps:
    Au départ il y aura une sollicitation importante de la part des soignants mais une fois que les stratégies deviendront routinières, M. L pourra gagner en autonomie.

    Un point important restera les transmissions qui seront à faire à la future équipe qui prendra en charge M. L, et ce dans le but d’une continuité dans le travail de réinsertion et de réadaptation réalisé en SSR.

    Cependant d'autres professionnels peuvent intervenir dans la prise en soin de cette maladie. L'intervention d'ergothérapie a été proposée par des étudiantes de l'Institut de Formation en Ergothérapie sur les bases d'un cas fictif